\ *Vj DISCOURS PRELIMINAIRE ■ noiffances, & fur les caiaéleres qui les diftinguent, il ne nous reile plus qu’à for-* mer un Arbre généalogique ou encyclopédique qui les raflemble fous un même pas lans difficulté . Quoique philofophique que nous venons de donner de l’origine de nos idées , foit fort utile pour faciliter un pareil travail, il ne faut pas croire que l’Arbre encyclopédique doive ni puifle même être fervilement aiTujetti à cette hiftoire. Le fy-itème général des Sciences & des Arts eft une efpeee de labyrinthe , de chemin tortueux, où l’efprit s’engage fans trop connoître la route qu’il doit tenir. Pref-fé par fes befoins, & par ceux- du corps auquel il eft uni, il étudie d’abord les premiers* objets qui fe préferitent à lui ; pénétré le plus avant qu’il peut dans la connoiflànce de ces objets ; rencontre bientôt des difficultés qui l’arrêtent ; & foit par l’efpérance ou même par le defefpoir de les vaincre, le jette dans une Nouvelle route ; revient enfuite fur fes pas , franchit quelquefois les premières barrières pour en rencontrer de nouvelles ; & paffant rapidement d’un objet à un autre, fait fur chacun de ces objets à différens intervalles & comme par fecouf-fes une fuite d’opérations dont la génération même de fes idées rend la difcon-tinuité néceffaire. Mais ce défordre tout philofophique qu’il eft de la part de lame, défigureroit, ou plutôt anéantiroit entièrement un Arbre encyclopédique dans lequel on voudroit le ré présenter. D’ailleurs, comme nous ¡¿’avons déjà fait fentir au fujet de la Logique, la plû-part des Sciences qu’on regarde comme renfermant les principes de toutes les autres, & qui doivent par cette raifon occuper les premières places dans l’ordre encyclopédique, n’obfervent pas le même rang dans l’ordre généalogique des idées, parce qu’elles n’ont pas été inventées les premières. En effet, nôtre étude primitive a dû être celle des individus ; ce n’eft qu’après avoir confidéré leurs propriétés particulières & palpables, que nous avons par abftra&ion de nôtre efprit, envifagé leurs propriétés générales & communes, & formé la Métaphyfi-que & la Géométrie ; ce n’eft qu’après un long ufage des premiers Agnes, que nous avons perfectionné l’art de ces fignes au point d’en faire une Science; ce n’eft enfin qu’après une longue fuite d’opérations fur les objets de nos idées, que nous avons par la réflexion donné des réglés à ces opérations même. Enfin le fyftème de nos connoiffances eft compofé de différentes branches, dont plufleurs ont un même point de réunion ; & comme en partant de ce point il n’eft pas poflïble de s’engager à la fois dans toutes les routes, c’eft la nature des différens efprits qui détermine le choix. Aufli eft-il aflèz rare qu’un même efprit en parcourre à la fois un grand nombre. Dans l’étude de la Nature l les hommes le font d’abord appliqués tous, comme de concert, à fatisfaire les befoins les plus preffans ; mais quand ils en font venus aux connoiffances moins ab-folument néceflàires ,• ils ont dû fe les partager, & y avancer chacun de fon côté à-peu-près d’un pas égal ; Ainfi plufleurs Sciences ont été , pour ainfi dire, contemporaines; mais dans l’ordre hiftorique des progrès de l’efprit, on ne peut les embraffer que fuccefllvement. Il n’en eft pas de même de l’ordre encyclopédique de nos connoiffances. Ce dernier confifte à les raffembler dans le plus petit efpace poflible , & à placer, pour ainfi dire, le Philofophe au-deffus de ce vafte labyrinthe dans un point de vûe fort élevé d’où il puiiîè appercevoir à la fois les Sciences & les Arts principaux; voir d’un coup d’œil les objets de fes fpéculations , & les opérations qu’il peut faire fur ces objets; diftinguer les branches générales des connoiffances humaines, les points qui les féparent ou qui les unifient ; & entrevoir même quelquefois les routes fecretes qui les rapprochent. C’eft une efpeee de Mappemonde qui doit montrer les principaux pays, leur pofition & leur dépendance mutuelle, le chemin en ligne droite qu’il y a de l’un à l’autre; chemin fouvent coupé par mille obftacles, qui ne peuvent être connus dans chaque pays que des habitans ou des voyageurs, & qui ne fauroient être montrés que dans des cartes particulières fort détaillées. Ces cartes particulières feront les différens articles de l’Encyclopédie, & l’arbre ou fyftème figuré en fera la Mappemonde. Mais comme dans les cartes générales du globe que nous habitons, les objets font plus ou moins rapprochés, & préfentent un coup * d’œil différent félon le point de vûe où l’œil eft placé par le Géographe qui conftruit la carte, de même la forme de l’arbre encyclopédique dépendra du point de vûe où l’on fe mettra pour envîfager l’univers littéraire. On peut donc imaginer autant de fy- ftè mes