POE 5? pointe, que 1e plus bel endroit qui foit dans Lucatn, « peut ecre dans aucun poëte, eft le difcours de Caton «ans lequel ce tioïque ennemi des fables, refufe d’entrer leujement dans le temple de Jupiter Hammon. ■Ce tr’eft donc point pour n’avoir pas fait ufage du t»î-Biitere des dieux, mais pour avoir ignoré Part de bien conduire les affaires des hommes, que Lucain eft fi inférieur à Virgile. Faut-il qu’après avoir "peint Céfar rompée, Caton avec des traits fi forts, il foit fi faible quand il les fait agir? Ce rr’eft prefque plus qu’une ga-ïette pleine de déclamations; il me femble, ajoute M de Voltaire, que je vois un portique hardi & immenfe qu> me conduit à des ruines. Le triffin ( Jean-George ) naquît à Vieence en 1478 dans le tems que le i alfe etoit encore au berceau. Après avoir donné la fameufe Sophonisbe, qui eft la première tragédie écrite en langue vulgaire, il exécuta le premier dans,.la.me. Iangue un poème épique, Jtalia libéra-diyife en vmgt-fept chants, dont le fujet elt l’Italie dpüvrée des Goths par Bélifaire, fous l’empereur Juiti-niem. Son plan eft fage & bien deffiné, mais la poéfie du ilyle y eft tres-Ioible. Toutefois l’ouvrage réuffit & cette .aurore du bon goût brilla pendant quelque tems jufqu a ce qu elle fut abforbée dans le grand jour qu’apporta le 1 aire. ~ Le_ Triffin joignoit à beaucoup d’érudition une grande capacité. Leon X. l’employa dans plus d’une affaire importante. II fut ambalfadeur auprès de Charles-Quint • imis^enfin il facrifia fan ambition, & la préteniue fo-Jfdire des affaires publiques à fan goût pour les lettres, il etoit avec raifon charmé des beautés qui font dans Homere, & cependant fa grande faute eft de l’avoir imité; il en a tout pris hors le génie. Il s’appuie fur Ho-mere pour marcher, & tombe en voulant le fuivre: il cueille les fleurs du poème grec, mais elles fe flétrillent entre les mains de l’imitateur! Il femble n’avoir copié ion modèle que dans le détail des defcriptions, & même fans images. Il eft très-exaâ à peindre les habille-mens & le meubles de fes héros, mais il ne dit pas un mot de leurs caraderes. Cependant il a la gloire d’avoir été le premier moderne en Europe qui ait fait un poème épiqne régulier & fenfé , quoique faible, & qui ait ofé lecouer le joug de la rime en inventant les vers libres werjifcolt,. De plus, il eft le feul des poëres italiens «ans lequel il n y ait ni jeux de mots, ni pointes, & celui de tous qui a le moins introduit d’enchanteurs & de xicros enchantes dans fes ouvrages; ce qui n’c'toit pas un petit mérite. r j ^a"di?,qu? ,e Tfilîln en Ita,ie Tuivoit d’un pas timide & toib.e lçs traces des anciens, le Camoëns en Portugal, ouvroit une carrière toute nouvelle, & s’acqoer-roit une réputation qui dure encore parmi fes compatriotes, qui 1 appellent le Virgile pot laçais. Le Catnoèns (Luigi) naquit dans le«;dernieres années du régné célébré de Ferdinand & d’Ifabelle, tandis que Jean II regnoit en Portugal. Après la mort de Jean il vint a la cour de Lisbonne, la première année du règne d Emmanuel, le grand héritier du trône & des grands delleins du roi Jean. C’étoit alors les beaux jours du rortugal, & le terns marqué pour la gloire de cette nation , , Emmanuel, déterminé à fuivre le projet qui avoit échoué tant de fais, de s’ouvrir une route aux Indes Orientales par l’Qcean, fit partir erj 1497 Vafco de Gaina avec une flotte pour cette fameuie entreprifa, qui etoit regardée comme téméraire & impraticable parce quelle etoit nouvelle; c’eft ce grand voyage qu’a chanté leCamoens. La vie & les aventures de ce poëte font trop connues de faut le monde pour en faire le récit; d’ailleurs j eq ai déjà parlé tous ¡’article de Lisbonne. On fait qujl mourut à l’hôpital dans un abandon général, en JS79, âge d’environ yo ans. A peine fut-il mort, qu’on s’emprefla de lui faire des épitaphes honorables, & de le mettre au rang des grands hommes. Quelques villes fe difputerent l’honneur de lui avoir donné la nailfance ; ainfi il éprouva en tout le fort c Homere. Il voyagea comme lui, il vécut & mourut pauvre, & n eut de réputation qu’apres fa mort. Tant a exetnples doivent apprendre aux hommes de génie que ce n eft point par le génie qu’on fait fa fortune, & qu’ on vit heureux . ’ M Le fujet de la Lufiade traité par un génie auffi vif Ve e Gamoens, ne pouvoit que produire une nouvelle efpece d épopée. Le fond de fan poème n’eft ni une guerre, ni une querelle de héros, ni le monde en armes pour une femme; c’eft un nouveau pays découvert à 1 jiide de la navigation, 7 form XII. P O É ' Le poëte conduit la flotte portugaife I l’embouchure du Gange, décrit eu paiTant les côtes occidentales, le midi & 1 orient de f’Afrique, & les differens peuples qui vivent fur cette côte; il entremêle avec art l’biftoire du rortugal. On y voit dans le troifieme chaut la mort de !lnnré f>bre luCS d5, C?flro> époafe du -foi doni Pedre, :À?VeTro d-Cg(!ii^a été j°uée dans ce ‘¡«le fut e théâtre de i ans. O eft le plus beau morceau de Ca- moens; il y a peu d’endroits dans Virgile plus «tendrif-fans & mieux écrits. Le grand de'faut de ce poème eft le peu de liaifon qui règne dans toutes fes parties. Il reffemble aux voyaï cZAV/ ‘U'et- Le P°è'te ”’a d’aatre art que de bien conter le détail des aventures qui fe faccedent ; mais cet art feul par le plaifir qu’il donne, tient quelquefois lien Dhis?! 4S lUtreS: j1 C(l Vra' qa’U y a de* ^ions de plus grande beauté dans cet ouvrage, & qui doivent réuf- hr dans tous les tems & chez tous les peuples; mais ces fortes de fidions font rares, & la plûpart fout un mé- paganifme & du chriliianifme: Bac-chus & la Vierge-Marie s’y trouvent enfemble. Ae iLrrInClpal but de^ Porta&ais> aPrès Tétabliffement de leur commerce, eft la propagation de la foi, & Vé- fi’nbffirH nS/ndU fuCC^ de 1,enlraPnfe. Ur merveilleux 'lblfl3rd" d^gure tellement tout l’ouvrage aux yeux des leéieurs fenfés, qu il femble que ce grand défaut eût dû faire tomber ce poeme; mais la poéfie du ftyle & l’ima-gmation dans l’expreffion l’ont fautenu, de même que les beautés de 1 execution ont placé Paul VéronèG pm-mi les grands peintres. " ^ Le Tafe né à Sorrento en 15-44, commença la Gie-rujalemme Uberata dans le tems que la Lufiade du Camoëns commençait a paraître. Il enteudoit affez le portugais pour lire ce pointe, & pour en être jaloux II difoit que le Camoëns étoit le feu! rival en Europe qu’il craignît. 1 -r r/aiiUe-’ elle et0?t ,incere. ¿toit très-mal fondée; le I aire étoit autant audelfus du Camoëns, que le por-tugais etoit fupérieur à fes compatriotes. Il eût eu plus de_ raifon d avouer qu’il étoit jaloux de l’Ariofte, par qui ta réputation fut li long-tems balancée, & qui lui eft encore préféré par bien des italiens. Mais pour ne point trop charger cet article, je parlerai de l’Ariofte au lieu e la naitlance qui eft Keggio, voyez, donc Reggio, C tréog. mod. ) ’ r iCe jUi, à l’âge„de 31 ans c>ue le Ta,rt: don»a Ta Jeru-alem délivrée. Il pouvoir dire alors, comme un grand homme de 1 antiquité: J’ai vécu allez pour le bonheur & pour lagfaire. Le refte de fa vie ne fut plus qu’une chaîne de calamites & d’humiliations . Enveloppé dès 1 âSe * huit ans dans le banniffèment de fou pere fans patrie, lans_ biens, tans famille, perfécucé par les ennemis que lui fufcitoient fes talens; plaint, mais négligé par ceux qu il appelloit fes amis; il fouffrit l’exil la pnlon, ,a plus extrcine pauvreté, la faim même; &•’ ce qui devoir ajouter un poids infupportable à tant de mal-heurs,t la calomnie l’attaqua & l’opprima. d.e Eerrare, oü le proteaeur’ qu’il avoit tant célébré, avoit fait mettre en prifon : il alla â pié, couvert de haillons, depuis Ferrare jufqu’à Sorrento dans ie royaume de Naples, trouver une fœur dont il efpéroit quelque fecours;_ mais dont probablement il n’en reçut point, puifqu’il fat obligé de retourner à pié à Ferrare ou il fut encore emprifanné. Le défefpoir altéra fa conftitution robufte, & le jetta dans des maladies vio- I^rqifon 0ngues’ qui lu^ Ocrent quelquefois l’ufage d« Sa gloire poétique, cette confolation imaginaire dans des malheurs réels, fut attaquée par l’académie de la Cruféa en iy8y mais il trouva des défenfeurs; Florence lui fit toutes fortes d’accueils ;-l’envie ceffa de l’oc- fnrrrn,“|b0üt/e rq ans’ & fon tne'rite Turmonta tout. On lui offrit des honneurs & de la fortune; ce ne fut toutefois que lorfque fon efprit fatigué d’une fuite de ^flatter ét0U dCVCnU infe(lfit3le a toat ce ftui Pouvoit Il fut appelle à Rome par le pape Clément VIII. qui dans une congrégation de cardinaux avoir refolu de lui donner la couronne de laurier & les honneurs du triomphe cérémonie qui paroît bizarre aujourd’hui fur-tout en E rance , & qui étoit alors très-férieufe & très-honorable en Italie. Le Taffe fat reçu à.un mille de Rome Par cardl!;aux neveux, & Par un grand nom- bre de Prélats & d hommes de toutes conditions. On le conduit a 1 audience du pape: „ Je defire, lui dit le „ pontife qUe_ vous honoriez la couronne de laurier iy 8“' a honore jufqu’ici tous ceux qui l’ont portée * Les^deux cardinaux Aldobrandins neveux du pape qui gdmirpieqt le Talfe, fç chargèrent de l’apparS^ w Oooot cou* '