Sibylles.. -22 NOUVELLE D 1 ont citées fous le nom des Livres des Sibylles qu’elles portoient effeétivement. Ce fyftéme, qui eft affez bien inventò, fouffre néanmoins beaucoup de difficultez. Car premie-rement le recucii des vers attribuez aux Sibylles, fait aprés l’embrafement du Capitole ne concer-noit pas moins les fuperftitions Paiennes,que les -vers anciens attribuez à la Sibylle de Cumes. Se-condementlesprophetiesdejEsus-CHRisT,qui font dans les paffages des Livres des Sibylles ci-tez par les Peres, étant plus claires, que celles qui font dans les Prophetes des Juifs , il n’y a pas d’apparence, qu’elles viennent d’un Juif. Enfin la dottrine des Livres Sibyllins eft plùtót celle d’un Chreftien, que celle d’un Juif. Jesus-Christ y eft préditclairement,laRefurrec-tion, lejugement, le feu del’enferyfontmar-quez en termes formels,il y eft parie du Royaume de mille ans, de l’avenement de l’Ante-chrift, & de quantité d’autres chofes de cette nature, qui ne peuvent avoir efté dites, que par un Chreftien. Il y a donc bien plus d’apparence, que les Livres attribuez aux Sibylles ont efté fuppofez par un Chreftien, que par un Juif. Au refte perfonne ne doit s’étonner, que nous rejettions comme fuppofez des Livres, que les anciens ont alleguezcommeveritables, &ilne faut pas s’imaginer,qu’on méprife pour cela l’au-torité des Peres,ou qu’on faffe tort à la verité. Au contraire onluiferoit injure, fi on vouloit l’ap-puyer par de faulfes preuves , principalement quand on eft convaincu de leur fauffeté. Les Peres font excufables, d’avoir cité ces vers des Sibylles comme veritables , parce qu’ils ne les avoient pas examinez,&.que les trouvant publiez fous le nom des Sibylles, ils croioient de bonne foi, qu’ils en étoient : mais ceux, qui font con-vaincus du contraire, ne feroient pas excufables, s’ils s’en vouloient encore fervir, &s’ilsn’a-yoiioient ingenument ce que la verité les oblige dereconnoìtre. Et certes, fine fautpoint s’étonner, que les Peres n’aient point examiné ces Li-yres en critiques ; on fqait affez, qu’ils s’appli-quoient tous entiers à des chofes de plus grande confequence pourlors, & qu’il leur arrivoit fou-vent de fe méprendre dans des Hiftoires propha-nes, & de citer des Livres fuppofez, tels que font Hyftape, & Mercure Trifmegifte, qu’ils ont prefque toujours joints aux Livres des Sibylles ; les aftes de Pilate, des Evangiles apo-cryphes, plufieurs Attes des Apótres, & quantité d’autres monumens certainement fuppofez. Mais quoi que la plùpart des anciens aient cité les Oracles des Sibylles, il y avoit toutefois dés lftrs plufieurs Chreftiens, qui les rejettoient com- me fuppofez , & qui ne pouvoient approuver Sibyl'cst ceux qui s’enfervoient, les appellant méme par dérifion Sibylliftes. C’eft ce dont Origenes eft té-moin dans fon Livre cinquiéme contre Celfe; Celfc , dit-il, nous objeiìe , qu’il y a farmi non: des Sibylliftes , feut - ótre , farce qu’il a odi dire , qu’il y en a farmi none , qui refrennent ceux qui difent que la Sibylle eft une frofhetejfe , f les affellent Sibylliftes. Saint Auguftin a auffi re-connu la fauflété de ces Oracìes prétendus ; & toutes les fois qu’il en parie, il témoigne qu’jl n’eft pas convaincu de leur verité, AuLivreig. de la citò deDieu chap. 45. Si ce n’eft, dit-il, qu’on dife que les Profbeties , qu’on rafforte fous le nom des Sibylles & des autres touchant J E-SUS-ChrisT, ont eftéfeintes far des Chré-tiens. Et au chap. 47. On feut croire, que toutes les Profheties touchant J esUs-Ch r ist, qui ne font foint dans l’Periture , ont eftéfeintes far des Chrétiens : Ainfti il n’y a rien de fini folide, four refuter les Paiens , que d’afforter les Profheties que nota tirons des Livres de nos e'rl-nemis. Mais les Paiens ,• dit-on, n’ont point douté de la verité des prédittions des Sibylles rapportées par les Peres, ils leur ont feulement donne un autre fens. ils ont méme reconnu, que les ver? des Sibylles prédifoient la naiffance d’un nou-veau Roi, & un changement conliderable. Cice-ron en parie en plufieurs endroits. Quand Pom-pée prit la ville de Jerufalem, le bruit courut que la Sibylle prédifoit, que la nature deftinoit un Roi au peuple Romain, le Senat en fut méme étonné, & ne voulut point àcaufe de cette pre.-diétion envoier de General, ni d’Armée en Egypte j Lentulus, au rapport de Ciceron, & de Salufte, fe flatta, que c’eftoit lui qui devoit ètra ce Roi predit par les Sibylles. D’autres ont interprete cette Prophetie de Cefar, ou d’Augufte, comme Ciceron , & Suetone le remarquent. V irgile dans la quatriéme Eclogue rapporte de? vers de la Sibylle de Cumes, qui promettent la naiffance d’un nouveau Roi defeendu du Ciel. Enfin il eft fi vrai que les Paiens reconnoiffoient, que les Livres des Sibylles eftoient favorables aux Chreftiens, qu’ils leur défendirent de les lire, comme il paroìt par les paroles d’Aurelien au Senat, qui font rapportées par Vopifcus. Je m etonne , dit-il , Meflìeurs , que vous foiez. ft long-temfs à confulter les Livres des Sibylles, comme fi on traitoit dans une ajfemblée de Chrétiens , & non dans le frincifal lieu de la Religio» Pomaine. Ces preuves font fpecieufes en apparence, mais quand on les approfondit, on trouve, qu’el-les n’ont rien de folide. LesPaiens nefontja-mais