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            d’autres graves dommages. Malgré les exagérations inévitables de ces accusations tardives, il est permis de leur accorder quelque créance, d'autant plus que la simple désobéissance de Genève aux ordres du duc ne semble pas un motif suffisant pour expliquer les effets de sa colère et surtout de celle de son gendre, Louis XI. Ce dernier convoitait Genève, et il n’était pas dans son caractère de traiter ainsi les villes qu’il désirait attacher à sa personne. En revanche, une injure publique était de nature à lui faire oublier sa pondération ordinaire et sa politique cauteleuse.
       Pendant que ces événements se succédaient à Genève, le duc s’était retiré à Chambéry, plein de colère contre son fils. Le prince d'Orange¹, le marquis de Rothelin², les députés des Ligues s'interposèrent. Le duc Louis, malgré l’appui secret de Louis XI, ne put résister à la pression de la noblesse de Savoie et à l’attitude des Etats, et la réconciliation entre le père et le fils eut lieu en public, le 9 novembre 1462 : « A la requête « de la duchesse, ma femme, qui est fort malade, laquelle m’en « ha requis, » dit le duc, « et aussi de mes bons pareils et amys « des trois Estatz de mon pays, et de mes bons amys et alliés « des ligues d Allemaigne, qui m’en ont prié et requis, je vous « pardonne tout à vous tous et à un chascung de vous³. » Deux jours après, la duchesse mourait (11 novembre). L’accord n était qu’apparent, et Philippe, sollicité de rejoindre son père à Lyon, où il était allé se réfugier auprès de son gendre, fut arrêté à Vierzon et enfermé au château de Loches (1463); il n'en sortit qu’au mois de mars 1466. Ce fut Genève qui paya

       ¹ Guillaume VII.

       ² Louis I, marquis de Rothelin. second fils de François I d’Orléans Longueville.

       ³   Document sur la façon dont Philippe de Savoie s’empara des Cypriotes en 1462, publié par Ménabréa dans V Académie royale de Savoie, Documents, t. i, p. 265.