l’italie sous le joug

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peler à la génération montante que, même après
1870, il existait des mères italiennes qui devaient
subir le triste sort de Giulia et se désoler comme
elle.
Des associations irrédentistes diverses ont
essayé par de nombreux moyens d’entretenir des
relations constantes et directes avec les frères
italiens de l’autre côté de la frontière. On a soutenu
la langue italienne et la culture italienne, que l’Au­
triche combattait dans une certaine mesure. On
exprima le vœu de la création d’une université
italienne à Trieste, mais l’Autriche fit la sourde
oreille. En revanche, il existe dans cette ville tout
italienne un théâtre italien dont la propagande a
pu se servir. Ainsi, lorsque l’auteur dramatique très
populaire, mais aussi très discuté, Sam Benelli, eut
composé, il y a quelques années, son drame histo­
rique de La Gorgone, il voulut que la première
représentation fût donnée à Trieste : c’était comme
un salut adressé par lui à ses compatriotes opprimés.
La première eut lieu en effet à Trieste, le 14 mars
igi3, au milieu d’ovations enthousiastes. Cette
démonstration patriotique eut son retentissement
dans toute l’Italie. Les irrédentistes continuèrent
leur propagande encore plus à découvert, et l’idée
de la réintégration des provinces perdues gagna
sans cesse des forces. Il y a deux ans, pendant un
séjour dans l’Italie du Nord, j’eus l’occasion de
m’entretenir dans diverses villes avec de nombreux
artistes, savants et hommes politiques, et je pus
constater que l’alliance avec l’Autriche était non
seulement impopulaire, mais détestée et méprisée;