LES SYNDICATS OUVRIERS ET LE PATRONAT * 127 en outre que les délégués institués par spécialités ne peuvent présenter que les réclamations de leurs mandants, laissant au règlement le soin de fixer les conditions et la périodicité des entrevues. Enfin, les délégués étaient présentés comme les intermédiaires entre leurs mandants et les contrôleurs de la main-d'Åuvre pour les réclamations d'ordre collectif, ce qui laissait à ces derniers compétence exclusive pour les réclamations individuelles. La circulaire du 5 septembre précisa ces données ; il avait été constaté dans les usines des conceptions très diverses sur le rôle des délégués. Certains industriels ne voyaient en eux que des intermédiaires pour transmettre les doléances individuelles des ouvriers. Inversement, les ouvriers considéraient parfois les délégués comme des mandataires du syndicat qui n'auraient pas seulement à examiner les questions intéressant leur atelier, mais celles-là mêmes qui intéressent l'usine entière. Certains même auraient voulu pouvoir réunir en commission tous les délégués d'atelier d'une même usine et placer le patron en face de cette espèce de délégation syndicale. Cette dernière conception, si on la favorisait, risquait de soulever la méfiance patronale, de créer des conflits et même de nuire au bon fonctionnement des organisations syndicales qui ont leur rôle spécial à jouer. A vrai dire, il semble bien difficile de limiter ainsi le rôle des délégations ouvrières. Quelle que soit la séparation des corps de métiers dans une même usine, il est bien certain que la solidarité d'intérêts demeure étroite entre elles et que, par une tendance toute naturelle, les délégués sont amenés à désirer se concerter, confronter leurs vues, et présenter collectivement leurs demandes Mais les syndicats ouvriers s'émurent à la pensée qu'il allait se constituer, dans chaque usine, de petits groupements de délégués très capables d'opposer les vues particulières de leurs mandants aux vues et à la politique générales de la corporation. Il en résulta que beaucoup de délégués ouvriers, voulant faire preuve de loyalisme à l'égard de leurs syndicats, prirent